Emmanuel Macron a, en huit ans de présidence, accouché d'une France à deux visages. Le premier, régulièrement confirmé par les prises de parole du MEDEF – le patronat – est celui des patrons malheureux.

La newsletter qui bouscule la France par Richard Werly

 

Cette France qui aime les patrons (étrangers)

Emmanuel Macron a, en huit ans de présidence, accouché d'une France à deux visages.

Le premier, régulièrement confirmé par les prises de parole du Medef – le patronat – est celui des chefs d'entreprise malheureux. Ils n'en peuvent plus, disent-ils, d'être surtaxés et laminés par les batteries de normes ou d'obligations légales. Ils s'estiment floués par les politiques qui, après avoir abaissé la durée du travail à 35h hebdomadaires ou réformé les régimes de retraites, multiplient ensuite les niches et les dérogations, alourdissant encore plus le fardeau des ressources humaines. Et ils ne comprennent pas pourquoi, dans ce pays d'entrepreneurs qui vit naitre Gustave Eiffel, Marcel Dassault, François Michelin, Gérard Pélisson et Paul Dubrule (co-fondateurs du groupe hôtelier Accor), Bernard Arnault ou Xavier Niel, leurs parcours ne suscitent pas plus de vocations alors qu'environ 70% des Français disent, au fil des sondages, «aimer l'entreprise».

Le second visage du pays, pris sous l'angle économique, est celui du sommet «Choose France» dont le chef de l'Etat a fait son rendez-vous fétiche. Lundi 19 mai, un nouveau chiffre supposé mirifique est tombé: 37 milliards d'euros d'investissements étrangers et plus de dix mille emplois promis, ce qui place le pays de la CGT et des grèves en pole position européenne. Place à la France «attractive», où les entrepreneurs internationaux sont «welcome», tout comme les chercheurs américains de haut niveau que Paris rêve de débaucher de la Silicon Valley…

Deux France ou bien une seule? A vrai dire, je vois plutôt les choses ainsi. Grattez sous l'épais vernis administratif de la République et l'inventivité, le goût de l'entreprise et du profit, mais aussi la productivité des Français ne tarderont pas à apparaitre.

Résultat: des patrons français, boucs émissaires, sans cesse pris à partie ou désignés comme responsables du malaise social. Et des patrons étrangers à qui on déroule chaque année le tapis rouge, en les citant en exemple et en leur offrant des conditions fiscales avantageuses. La France à deux visages n'en finit pas de payer cher ses contradictions.

Bonne lecture, avec les patrons aventuriers!

(Pour débattre: richard.werly@ringier.ch)

 

Le top 3

 

Les 5 questions qui plombent Retailleau et la droite française

Le ministre français de l'Intérieur vient d'être largement élu président des Républicains, le principal parti de la droite traditionnelle. Son positionnement ressemble fort à celui de l'ancien candidat à la présidentielle François Fillon, battu en 2017. Crédible?

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Roumanie, Pologne, Portugal... L'effet Trump patine en Europe

L'échec du candidat pro-Trump à la présidentielle roumaine, l'avantage du candidat pro-européen en Pologne et la victoire de la droite modérée au Portugal envoient le même signal: l'effet Trump existe, mais il commence à patiner, estime notre journaliste Richard Werly.

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Revenir à l'Elysée en 2032, pourquoi Macron ne dit pas non

Dans son intervention télévisée de près de trois heures mardi 13 mai, Emmanuel Macron n'a pas pris date pour les référendums qu'il affirme envisager. Et il a refusé de répondre sur une possible candidature en 2032. Sans toutefois l'écarter.

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Podcast

 

Salauds de riches: les Français détestent-ils vraiment l'argent?

Emmanuel Macron en reparle: et si la France instaurait un texte sur les «super riches» pour renflouer les caisses de l'État, en déficit chronique? La proposition rencontre un vrai succès. Mais pourquoi l'argent et le succès ont-ils, en France, si mauvaise réputation?

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Top ou flop?

 

TOP

Sarkozy, Fillon, Retailleau et le peloton

Bruno Retailleau parle déjà de 2027. Je sais. Pour n'importe quel lecteur suisse, lire que le responsable tout juste élu d'un parti politique se projette aussitôt dans la bataille présidentielle a de quoi laisser perplexe. Idem, pour son maintien au ministère de l'Intérieur, annoncé dans la foulée de sa très nette victoire sur Laurent Wauquiez à la tête du parti Les Républicains, avec presque 75% des voix. Bref, Retailleau a de l'ambition. Beaucoup. Quitte à oublier l'échec fracassant de Valérie Pécresse, sa candidate dans la bataille pour l'Elysée de 2022. 4,78% et pas de remboursement des frais de campagne: le camouflet devrait pourtant faire réfléchir.

Le nouveau patron des LR doit, en fait, éviter d'emprunter le chemin de ceux qui lui donnent des cauchemars, tout en inspirant sa ligne politique: Nicolas Sarkozy et François Fillon. Le premier, empêtré dans ses procès et ses condamnations, n'a toujours pas compris qu'il avait fatigué les Français à force de gesticulations et de connivence avec l'extrême droite, au point d'attiser leur soif d'un président «normal» nommé François Hollande. Le second, lui aussi coulé par une affaire de détournement de fonds publics, a succombé à son double langage. Trop donneur de leçons, trop pieux en apparence pour ne pas se retrouver cloué au pilori, une fois pris en flagrant délit de mensonge sur les emplois fictifs de son épouse.

Ces deux cauchemars sont ceux que Bruno Retailleau doit dissiper d'urgence. En démontrant, d'abord, qu'il est d'abord l'homme d'un projet à la fois conservateur et libéral. Puis en mettant l'intérêt de son camp et de ses idées avant son obsession présidentielle.

François Bayrou, Premier ministre de centre droit, se retrouvera naturellement sur la ligne de départ. Edouard Philippe, ancien chef du gouvernement venu de la droite, a déjà enfilé son dossard. Gabriel Attal et Gérald Darmanin rêvent d'une échappée solitaire. S'il ne veut pas être distancé, dans une course aujourd'hui écrasée par la droite nationale-populiste et ses candidats Marine Le Pen et Jordan Bardella, Bruno Retailleau doit, avant tout, pédaler dans le peloton.

 

Ça tourne

 

SUR FRANCE CULTURE, L'ESPRIT PUBLIC

Au menu: référendum et tragédie de Gaza avec Hervé Gardette et Blick.

SUR LCI

«Le temps de l'info» du Week-end autour de Paola Puerrari. Pour parler de Trump, bien sûr…

SUR FRANCE INFO

Les Informés du week-end autour de Victor Matet. L'actualité vue par les correspondants étrangers dont Blick.

 

Un livre, un débat

 

Gaza, tuerie coloniale

Lire pour comprendre. Lire pour se faire une idée plus juste de la situation sur le terrain, dans cette bande de Gaza soumise au rouleau compresseur impitoyable de l'armée israélienne. Lire pour ne pas tomber dans l'écueil de la caricature et des dénonciations injustes, alors que tant d'Israéliens pleurent toujours les morts tombés sous les coups du Hamas, lors de l'assaut terroriste du 7 octobre 2023. Lire, enfin, pour mettre des mots précis, forts, sur une réalité insoutenable: celle du nettoyage ethnique en cours dans ce territoire palestinien transformé en cimetière après un an et demi de guerre asymétrique.

J'ai donc lu les deux essais qui, chacun à sa manière, osent soulever le couvercle du silence. J'ai, dans le passé, donné un large écho aux livres consacrés au 7 octobre. Avoir leur récit glaçant bien en tête est indispensable pour qui s'aventure dans la lecture de «Permis de tuer - Gaza, génocide, négationnisme et Hasbara» de Pascal Boniface (ed. max Milo), avant de la compléter avec «Gaza, une guerre coloniale» sous la direction de Véronique Bontemps et Stéphanie Latte Abdallah (Ed. Actes Sud). Car c'est de l'autre tuerie, à l'échelle d'un territoire, dont parlent ces deux ouvrages à la fois engagés et documentés: celle du peuple palestinien qui se retrouve pris au piège, une fois encore, de l'engrenage de l'histoire. «Le deux poids, deux mesures sur ce conflit m'a toujours paru être une hérésie intellectuelle et une faute morale», assène d'emblée Pascal Boniface, cible de tous les défenseurs de l'Etat hébreu depuis son «Est-il permis de critiquer Israël?» publié en 2003, exactement vingt ans avant le 7 octobre.

«Permis de tuer» est un essai centré autour des pièges dans lesquels sont pris nos pays occidentaux. Pièges de l'histoire. Pièges du soutien indispensable au droit d'Israël à exister. Piège du droit international. C'est de là, argumente l'auteur, que l'Etat hébreu et les plus fanatiques dirigeants pro-israéliens tirent leur force: de cette capacité à sans cesse instrumentaliser un conflit dont beaucoup contestent les racines.

En parallèle, «Gaza, une guerre coloniale», remet donc les pendules de l'histoire à l'heure. «Il n'y a malheureusement rien de nouveau à affirmer que les peuples opprimés et colonisés ont été et continuent à être soumis à une violence épistémique. On ne les montre et on ne les écoute que dans l'unique cadre de certains points de vue», juge l'anthropologue Ruba Salih.

Ces deux livres sont indispensables. Parce qu'ils empoignent le débat que tant d'autres veulent faire taire, les armes à la main et les pieds dans le sang.

«Permis de tuer» (Ed. Max Milo)

«Gaza, une guerre coloniale» (Ed. Actes Sud)

 
 

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